NOUVEAU 2009 (NEW 2009): UNE ETUDE DE 50 PAGES SUR LE TABAGISME PASSIF DU NARGUILE INCLUT L'AFFICHE TRUQUEE PAR LES EXPERTS FRANCAIS DE L'INPES (commentée dans cette lettre):

 

Traduction du titre: "Le houka (narguilé, chicha) et son tabagisme environnemental (tabagisme passif). Revue critique de la littérature scientifique et conséquences sur la santé publique"

Hookah (Shisha, Narghile) Smoking and Environmental Tobacco Smoke (ETS). A Critical Review of the Relevant Literature and the Public Health Consequences

Table of contents
(useful):

 

##########################

[Dr Kamal T. C.]

[undisclosed]

kamchaAgmail.com

 

Mr Xavier BERTRAND,

Ministre de la Santé et des Solidarités,

8, avenue de Ségur

75700 PARIS 07 SP

 

mathieu.monnet[a]sante.gouv.fr

CC: Directeurs de la DGS, MILDT et de l’INPES

laurence.danand[a]sante.gouv.fr

helene.monard[a]inpes.sante.fr

 

Paris, le 2 septembre 2006

 

OBJET: Dossier de presse sur la Journée Mondiale sans Tabac : « Le tabac, mortel sous toutes ses formes », daté du 31 mai 2006

 

Monsieur le Ministre,

Je tiens à vous informer que le document ci-dessus (1), publié sous l’égide de votre Ministère et de l’INPES (Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé) comporte un certain nombre de lacunes et erreurs. Ces dernières tiennent à deux raisons essentielles:

1-L’équipe chargée de la préparation du dossier se fonde exclusivement sur le premier rapport jamais publié par l’OMS sur le narguilé (chicha, narguilé, narghilé, « waterpipe », « hookah »)(2). Or, ce document, qui est le produit d’une revue de la littérature exclusivement anglophone, comporte de graves erreurs, particulièrement de nature méthodologique, tôt relevées (3). Ces dernières couvrent autant le domaine biomédical que sociologique, anthropologique et historique. J’ai signalé l’existence de ce problème dans une lettre adressée au Directeur-général de l’OMS. Le Directeur de la TFI (Tobacco Free Initiative), au sein de cette organisation, en a pris note et me l’a confirmé (4). En bref, ce document, exclusivement retenu par vos experts, est mort-né et la publication de sa critique intégrale est en cours (5). Il est aussi à votre disposition sur simple demande. Par ailleurs, on remarque que ce rapport fut préparé par des équipes composées exclusivement de chercheurs états-uniens et moyen-orientaux et financées par des sources nord-américaines. Pas un seul expert européen, a fortiori l’auteur de travaux précoces sur le sujet (*), n’a été consulté sur ce sujet.

2- Pour des raisons qui n’ont rien à voir ni avec la science, ni, ici, avec la santé publique, les responsables du dossier de presse sur le narguilé ont délibérément choisi d’écarter les travaux scientifiques importants existant en français, et connus de la communauté des chercheurs en tabacologie (6, 7, 8). Ce qui est à mon avis plus grave, c’est que nombre d’organisations françaises participant à la Journée Mondiale Sans Tabac n’ont pas été consultées. Pour ne citer qu’un seul exemple, je vous informe que le Réseau Prévention Côte d’Or (Dijon) a consacré deux ateliers au narguilé dont l’essence aurait pu servir à ce dossier de presse, n’est-ce pas ? Je vous invite donc à vous mettre en contact avec son président pour de plus amples informations.

 

RESUME DES ERREURS CONTENUES DANS LE DOSSIER DE PRESSE

-« Cette façon de consommer le tabac, apparue en 2001 ». Cette affirmation est fausse et n’est basée sur aucune donnée scientifique. La suite de l’affirmation, au sujet du chiffre de salons, est également erronée.

-L’affirmation que « Le fait que l’eau retienne une partie de la nicotine au passage incite les fumeurs à inhaler plus profondément (pour « avoir leur dose ») » révèle, je crains, une totale méconnaissance du sujet ; notamment de la variabilité des schémas de fume et des divers mélanges. Les fumeurs inhalent, quant ils le font et dans certaines conditions, plus profondément, pour bien d’autres raisons que recherche exclusive de nicotine.

-« le passage par l'eau n'élimine pas les composants toxiques, parmi lesquels le monoxyde de carbone, les métaux lourds et les carcinogènes, produits aussi bien par la combustion du tabac que celle des braises (charbon naturel ou auto-allumant) entretenant celle-ci ».

Le passage dans l’eau n’élimine évidemment pas toutes les substances toxiques mais il en arrête un certain nombre, particulièrement cancérogènes. Ce dossier de presse reprend toutes les erreurs méthodologiques du rapport de l’OMS. La question des métaux lourds, par exemple, est en contradiction avec les résultats d’autres études en Egypte et ailleurs, occultés dans le rapport. Une autre grave erreur, reprise sans réfléchir par votre comité d’experts, est d’insister sur la « combustion du tabac » quand il s’agit d’un processus apparenté à une distillation (7). Cette différence et ses conséquences, chimiques notamment, sont fondamentales.

-« le tabac adouci et aromatisé utilisé dans un narghilé peut constituer une porte d'entrée dans le tabagisme pour un certain nombre de personnes, particulièrement des jeunes, qui sans cela n'auraient jamais commencé à fumer. »

Cette simple phrase comporte plusieurs erreurs. Tout d’abord, il ne s’agit pas de tabac, tel que nous l’entendons communément, mais de tabamel, un mélange à base de tabac. La proportion de ce dernier atteint environ 30% et peut descendre jusqu’à 0%. Quant à l’argument du tremplin vers les cigarettes, il est absolument infondé. Il n’existe aucune étude sur le sujet et nous sommes en train de travailler sur ce sujet. Je remarque qu’il est aussi mis en avant à l’encontre du SNUS suédois, que les auteurs du dossier mettent, pardonnez-moi l’expression, « dans le même sac » que les cigarettes. Or, les plus grands experts mondiaux, dans des études sérieuses, en reconnaissent les qualités (baisse du risque de cancer, etc.) dans une perspective de réduction des risques. Je ne suis pas spécialiste de ce sujet mais je vois bien, là encore, que tous les spécialistes n’ont pas été consultés. Malheureusement Monsieur le Ministre, on s’en tient, au cœur même de la francophonie, à une langue de bois anglophone, fatale par son aveuglement, comme avec ce rapport erroné de l’OMS et d’autres études encore (9).

 

En résumé, tous ces égarements auraient pu être évités, comme dans le cas précédent, si la censure n’avait pas prévalu. De telles pratiques sont contraires à l’éthique professionnelle et dangereuses pour la santé publique à l’heure où les vrais problèmes posés par l’usage croissant du narguilé ne sont pas évoqués, et que des milliers d’adolescents s’adonnent de plus en plus à cette pratique (10).

J’estime que  nos concitoyens, et je pense particulièrement aux parents, ont droit à une information objective et dépassionnée sur ce sujet. Ou alors, pourquoi le contribuable paierait-t-il les experts ?  Qu’un article scientifique hautement pertinent et interpellant les autorités sanitaires sur les conséquences médicales de la pratique ait été censuré dans le pays de Voltaire illustre l’état de délabrement de la situation.

Finalement, je veux compter sur votre autorité pour qu’à l’avenir, ces pratiques cessent et que les représentants de toutes les disciplines et l’ensemble des courants de la tabacologie soient invités à participer aux débats sur le narguilé, devenu une nouvelle forme de tabagisme. Cette compétition est absurde et dangereuse. La science n’appartient pas à quelques individus et la santé publique ne devrait pas devenir un jeu ou un enjeu personnel pour certains.

Comptant sur votre compréhension et votre diligence dans l’action, je vous prie de croire, Mr le Ministre, en l’expression de ma considération distinguée.

[Dr Kamal T. C.]

(*) Anthropologue spécialisé dans la critique des études biomédicales sur le narguilé, DIU de Tabacologie de Paris (1998). Auteur d’une thèse de 420 pages, deux ouvrages (« Le narguilé », L’Harmattan 1997, 262 pages ; « Le monde du narguilé », Maisonneuve et Larose 2002, 156 pages) et d’articles transdisciplinaires de fond sur le sujet, publiés dans la presse biomédicale indépendante et de qualité.

NOTES

Je m’excuse de devoir citer autant mes travaux. C’est une réaction normale à la censure systématique dont ils ont fait l’objet, ici même, en France, par des chercheurs français.

(1) Dossier de presse Ministère de la Santé et INPES :

http://www.sante.gouv.fr/htm/actu/tabac/

(2) Rapport erroné de l’OMS :

http://www.who.int/tobacco/global_interaction/tobreg/en/  [au 15 déc. 2005]

(3) [K.C.]. Letter to the Editor: Serious Errors in this Study. Tobacco Control 2004 (2 Dec). A critical analysis of the following study: Maziak W, Ward KD, Afifi Soweid RA, Eissenberg T. Tobacco smoking using a waterpipe: a re-emerging strain in a global epidemic. Tobacco Control 2004; 13: 327-333.

http://tc.bmjjournals.com/cgi/eletters/13/4/327

(4) [K.C.]. Lettre au Dr JW LEE, Dir-Gal OMS, 15 déc. 2005. Lettre du Dr Yumiko MOCHIZUKI, Dir. TFI (Tobacco Free Initiative), datée du 28 février 2006.

(5) [K.C.]. A critical analysis of the erroneous WHO (World Health Organization) report on hookah smoking, the first ever published by this organisation (WHO Advisory Note: Waterpipe Tobacco Smoking: Health Effects, Research Needs and Recommended Actions by Regulators. Tobacco Free Initiative 2005 (forthcoming, 12 pages).

[Nota bene: cette critique a été finalement publiée : http://www.jnrbm.com/content/5/1/17 ]

Voir aussi: E-Letter to the Editor: Syria, Lebanon, Tobacco Research in General and Narghile (Hookah, Shisha) Smoking in Particular. Tobacco Control 2006 (8 June). A critical analysis of the following study: Ward KD, Eissenberg T, Rastam S, Asfar T,Mzayek F, Fouad MF, Hammal F,Mock J, Maziak W. The tobacco epidemic in Syria. Tobacco Control 2006;15;24-29.

http://tc.bmjjournals.com/cgi/eletters/15/suppl_1/i24#top

(6) [K.C.]. Tabacologie du narguilé. Alcoologie. 1999; 21 (1/83):88-9.

(7) [K.C.]. Le narguilé : analyse socio-anthropologique. Culture, convivialité, histoire et tabacologie d’un mode d’usage populaire du tabac. Thèse de doctorat, Université Paris X (France), 420 pages.

(8) [K.C.]. Shisha, hookah. Le narguilé au XXIème  siècle. Bref état des connaissances scientifiques. Le Courrier des Addictions 2004 (Oct) ; 6 (4) : 150-2.

www.vivactis-media.com/default/Som_Revue.asp?numrevue=17&numParution=1021 

(9) [K.C.]. E-Letter to the Editor: “Measuring Real Exposure to Narghile (Hookah, Shisha) Smoke and Other Concerns Related to Public Health”. European Journal of Public Health 2006 (Jul 2). A critical analysis of  Tamim H, Akkary G, El-Zein A, El-Roueiheb Z, El-Chemaly S. Exposure of pre-school children to passive cigarette and narghile smoke in Beirut. European Journal of Public Health 2006 (May 4): 4 pages.

http://eurpub.oxfordjournals.org/cgi/eletters/ckl043v1#18

(10) [K.C.]. Patologie associate all’uso del narghile. [Fr: Pathologie associées à l’usage du narguilé]. Tabaccologia 2006;1:27-34. www.tabaccologia.org/archivio.htm (choisir 2006/1)

 

 

 

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ADDENDUM (mars 2007)

La critique dur apport de l'OMS a finalement été publiée:

A Critique of the WHO’s TobReg “Advisory Note” entitled: “Waterpipe Tobacco Smoking: Health Effects, Research Needs and Recommended Actions by Regulators” [trad. libre : Fume du tabac au moyen du narguilé : Effets sur la santé, besoins en recherche et actions recommandées par les régulateurs](2005). Journal of Negative Results in Biomedicine 2006 (17 Nov); 5:17.

http://www.jnrbm.com/content/5/1/17

En français: PRESSER ICI